Archive for septembre, 2010
Les beaux jours
Balthus Le lever
«Je prépare une nouvelle toile. Une toile plutôt féroce (…) c’est une scène érotique. Mais comprends bien, cela n’a rien de rigolo, rien de ces petites infamies usuelles que l’on se montre clandestinement en se poussant du coude. Non je veux déclamer au grand jour avec sincérité et émotion tout le tragique palpitant d’un drame de la chair, proclamer à grands cris les lois inébranlables de l’instinct. Revenir ainsi au contenu passionné d’un art. Mort aux hypocrites ! Ce tableau représente une leçon de guitare, une jeune femme a donné une leçon de guitare à une petite fille, après quoi elle continue à jouer de la guitare sur la petite fille. Après avoir fait vibrer les cordes de l’instrument, elle fait vibrer un corps».
Thérèse rêvant par Balthus, 1938
Les jeunes filles sont si absorbées (dans leur lecture, leur rêve, leur toilette) qu’elles semblent inconscientes du regard qu’on pose sur elle. Troublante cette jeune adolescente, endormie dans une pause provocante : assise, une jambe relevée laissant voir sa culotte blanche et un chat qui lape du lait sous son pied. D’autant plus troublante qu’elle est montrée, comme le sont toutes les jeunes filles peintes par Balthus, dans son intimité sans savoir qu’elle estobservée.
Alice dans le miroir
La provocation dans ce tableau produire est dans la représentation d’une scène banale de la vie quotidienne (une jeune femme se brossant les cheveux) prétexte à nous montrer le le corps de cette jeune femme, dans une pose (le pied sur une chaise) assez suggestive….
La chambre1952-1954
Dans ce tableau (portrait du peintre Derain) l’on voit un père, le regard sévère, la main semblant caresser sa poitrine et, en arrière plan, une jeune fille semblant s’ennuyer, habillée de façon quelque peu équivoque et une main entre les cuisses. Cette atmosphère d’inceste captive car elle choque sans qu’à première vue on ne se sente coupable de voir cette scène.]
La pose acrobatique de cette jeune fille , rien moins que naturelle, est là aussi pretexte à nous montrer ses jambes: le noir de la jupe et le noir des chaussures soulignant la blancheur des cuisses qui est comme rehaussée par les chaussettes blanches
Est-ce la lecture (à voix haute) que lui fait la jeune fille la jeune fille au premier plan qui plonge dans l’extase (la tête renversée…les yeux fermés…la position des cuisses…) sa compagne sur le divan?
La Patience, 1943
La victime
Trait pour trait : de Juliette à Thérèse
Cette filiation très nette entre Courbet et Balthus m’est apparue lorsque j’ai découvert le portrait qu’avait fait Gustave Courbet de sa sœur Juliette. On y retrouve nombre de traits esthétiques des peintures de jeunes filles qui caractériseront l’œuvre de Balthus : visage figé, presque hiératique, posture et proportion étranges de la tête par rapport au buste, représentation presque naïve des traits du visage comme de la position du corps : signes pour les uns d’un manque manifeste de maîtrise technique, pour les autres d’un discours typiquement surréaliste, axé sur une forme de "désincarnation". La seule différence notoire est la pose tout à fait respectable dans ce portrait de Courbet alors que les jeunes filles de Balthus apparaissent, pour la plupart, dans des positions manifestement suggestives.
Il est très intéressant de noter comment Balthus a pu marquer mon inconscient au point d’émerger aussi spontanément à la découverte de la toile de Courbet et non l’inverse. En regardant la Juliette de Courbet, c’est instantanément "les beaux jours" ou "Thérèse" qui m’ont été suggérés.
La référence revendiquée de Balthus à Courbet est surtout connue dans son tableau la Montagne qui ferait explicitement référence aux Jeunes filles du village de Courbet.
Mais on pourrait aussi pousser la comparaison (et l’influence ?) entre les positions lascives caractéristiques des modèles féminins de Balthus( http://laboiteaimages.blog.lemonde.fr/files/2009/12/040_balthus.1261305700.jpg) avec celles de la Femme aux bas blancs de …. de Courbet (http://picasaweb.google.com/lh/photo/JA7kjPGb8T43CxYFSIe8oQ)
Les deux peintres ont de toute façon en commun le fait d’utiliser un figuralisme correspondant aux techniques les plus classiques, sans toutefois y apporter un travail aussi approfondi que leurs contemporains, surtout pour bousculer les conventions bourgeoises, via les thèmes abordés et leurs sous-entendus.
Courbet : Portrait de Juliette (sœur de Courbet) – 1844.
Balthus : Thérèse rêvant – 1938.